Étiquetage des OGM en France

Il existe deux grands types d'OGM: ceux qui ont été modifiés dans leur structure et ceux auxquels ont été rajouté une résistance aux ravageurs ou aux herbicides.

 

   

Comme le montre ce tableau, seuls les OGM du premier type ont déjà été commercialisés. Ces OGM sont donc ceux qui vont nous intéresser.

  • Les OGM herbicides

Ces OGM possèdent un gène de résistance à un herbicide donné, produit par la même firme que celle qui produit les semences modifiées.

Exemple d'OGM herbicides :

Le Maïs, le Coton, le Colza et le Soja Roundup Ready (RR), produits par Monsanto sont résistants à l'herbicide total Roundup également produit par Monsanto.

Ces OGM permettent aux agriculteurs de semer plus tôt, et d'utiliser des variétés à haut rendement et à maturation tardive, donc d'effectuer des récoltes plus importantes et moins risquées avec une espérance de plus gros bénéfices, du moins théoriquement.

Ils peuvent également arroser leurs cultures d'herbicide (dans le cas des éléments cités ci-dessus du Roundup produit également par Monsanto) dès que les premières pousses apparaissent puisqu'elles sont indifférentes à ce produit ce qui n'est pas le cas avec une plante non modifiée. Un seul herbicide suffit puisque le Roundup contrôle 145 espèces de mauvaises herbes.

  • Les OGM pesticides

Les OGM pesticides améliorent la quantité et la qualité de la production, car ils ont fait l'objet d'un ajout de gène d'une bactérie du sol nommée Bacillius thuringiensis, qui code pour la production d'une toxine qui tue les pyrales (voir Application). Les agriculteurs peuvent donc diminuer la quantité d'insecticide qu'ils appliquent aux cultures et améliorer leur bénéfice.

Mais il y a un risque que certains insectes développent une résistance au gène Bt et deviennent ainsi de "super" insectes nécessitant alors une quantité beaucoup plus grande de pesticides pour être éliminés.

Une étude de cas: l'Argentine

Nous allons maintenant essayer de savoir si l'utilisation des OGM est véritablement efficace pour augmenter les rendements. Pour cela, nous avons mené une recherche sur la production en Argentine d'OGM, plus précisement sur le soja RR (Rondup Ready, une espèce résistante au Roundup) durant les 6 dernières années.

En Argentine, les OGM ont été introduits en 1996 sans la moindre contestation, et aujourd’hui la moitié des terres cultivées en Argentine sont des plantations de soja OGM (18 millions d’hectares). De plus, la quasi-totalité des OGM introduit en Argentine (essentiellement du Soja RR Roundup Ready) proviennent de l’industriel Monsanto.

Le premier effet a été une réduction du nombre des exploitations agricoles. Le gouvernement de l’Argentine donne la priorité aux grandes exploitations et estime que les petites exploitations de moins de 200 hectares ne sont pas rentables. L'utilisation des OGM qui nécessite des investissements plus importants renforce cette tendance à la concentration. Par conséquent,  pas moins de 200 000 petits producteurs vont se retrouver ou se retrouvent obligés de quitter leur terres, avec de nombreux drames humains à la clef.

En termes d'utilisation des pesticides, les résultats sont également mitigés. Monsanto avait clairement affirmé que l’introduction d’OGM réduirait la quantité de glyphosate utilisé (vendu sous la marque Roundup) mais en réalité son utilisation a été multipliée par 14 pour une production 5 fois supérieure.

Cela fait donc un ratio près de 3 fois plus de glyphosate utilisé par unité produite, ce qui est très décevant. Cette utilisation accrue s'explique par le fait que le soja OGM est résistant au glyphospate qui est un mono herbicide. On peut donc se passer d'administrer des micro doses de Roundup couplées avec d’autres herbicides moins efficaces. Les producteurs de soja OGM utilisent donc un seul herbicide administré d’un coup pour toute une saison, ce qui est économique mais demande en revanche de très grandes quantités de glyphosate.

Cet abus de glythophosate a eu des effets négatifs puisque des plantes ont réussi à résister à cette utilisation intensive. Ceci a par conséquence donné naissance à des « super mauvaises herbes »

Pour lutter contre ces mauvaises herbes, et également contre le soja "spontané" (c’est-à-dire du soja qui pousse hors saison), les cultivateurs de soja ont commencé à pulvériser des herbicides plus forts sur leurs terres avant la plantation. On estime qu’actuellement 20 à 25 millions de litres de 2,4-D, 6 millions de litres d’atrazine (interdite dans l’Union européenne en 2004 parce qu’elle contamine les eaux souterraines) et 6 millions de litres d’endosulfan (un insecticide organochloré hautement toxique) sont utilisés sur les champs de soja chaque année.

Des experts cités dans une étude des Amis de la Terre considèrent que 25 millions de litres supplémentaires d’herbicides sans glyphosate seront nécessaires chaque année pour la lutte contre le sorgho d'Alep( ci contre)

 

Comme nous sommes dans un pays émergent, les réglementations sanitaires ne sont pas assez exigeantes pour pouvoir protéger les nappes phréatiques et les exploitants agricoles ne prennent presque aucune mesure de sécurité pour éviter la contamination des sols et de l’air. Les populations par conséquent subissent des problèmes médicaux et la situation ne semble pas s’améliorer.

Un autre effet de l'introduction des OGM  a été de modifier les pratiques agricoles. Le passage d’une polyculture produisant viande, produits laitiers, lentilles, haricots et autres légumes bon marché à une quasi monoculture de soja a rompu l’association élevage et rotation de culture qui permettaient de bons rendements . Cela a brisé la souveraineté alimentaire du pays et a fait par exemple chuter de 50% en 15 ans le nombre d’exploitations laitières.

L’un des avantages du soja OGM pour les gros exploitants agricoles est qu’il facilite l’agriculture "sans labour", c’est-à-dire un mode cultural qui permet un semis direct, ce qui signifie qu’ils ont besoin de peu de main d’œuvre. En effet, on estime qu’il suffit d’un seul ouvrier pour 500 ha de soja. Ceci permet donc aux exploitants de recourir à une culture intensive, avec une mécanisation très poussée. Ils n’accordent que peu d’attention à la santé à long terme des sols, en particulier s’ils louent les terres et les rendent ensuite à leurs propriétaires une fois que leur fertilité a été épuisée. Ce type de culture permet d’engranger à court terme des profits importants: l’un des plus gros producteurs, Grupo Los Grobo, qui cultive actuellement 150 000 hectares en soja, affiche des revenus annuels de 400 millions de dollars US et prévoit de doubler son chiffre d’affaires cette année (2008).

Toutefois, pour permettre à quelques groupes financiers d’obtenir des profits importants, l’Argentine paie le prix fort, en compromettant son avenir à long terme. Chaque année, plus de 200 000 hectares de forêts primaires sont abattues au fur et à mesure de l’avancée de la frontière des terres agricoles.  La monoculture intensive s’accompagne du lessivage, de l’érosion et de la dégradation des sols. On estime que la déforestation entraîne l’érosion de 19 à 30 millions de tonnes de sols par an. De plus, la culture du soja extrait des nutriments du sol et absorbe de l’eau, qui sont ensuite "intégrés" dans la récolte. Dans la pratique, cela signifie qu’un million de tonnes d’azote et 160 000 tonnes de phosphore sont "exportés" chaque année, en même temps que 42,5 milliards de mètres cubes d’eau. Ce sont là des pertes importantes. L’Argentine aura besoin de ces ressources à l’avenir pour son développement agricole.

Plus généralement, la forte augmentation des cultures de soja OGM est en train de transformer le Cône Sud en "République du soja", comme certains l’ont appelée. Elle n’a pas permis une augmentation de la productivité, comme le montre une enquête récente menée par l’Université du Kansas qui affirme que le soja RR a un rendement moyen de 6 à 10 % inférieur à celui du soja conventionnel.

Au final, les conséquences de la forte augmentation de la production de soja OGM argentin sont donc sérieuses: moindre diversité des cultures, dégradation des sols et déforestation, utilisation accrue de pesticides, agrandissement des exploitations, renforcement du pourvoir des grandes firmes agricoles et alimentaires. Il n'est évidemment pas possible d'attribuer aux seuls OGM tous ces effets économiques ou environnementaux qui ont  aussi d'autres causes.